Le Memorial des victimes rroms et sinté ne doit pas bouger
Il y a quelques semaines, des associations ont eu connaissance de plans de la Deutsche Bahn consistant à construire une nouvelle voie ferré juste en dessous du Mémorial aux victimes rroms et sinté du national-socialisme allemand. Le projet de construction conduirait soit à une fermeture temporaire de ce mémorial soit à son déplacement définitif à un autre lieu. Que les autorités aient pu envisager ces possibilités avec autant de légèreté alors qu’il a fallu 60 ans de négociations pour aboutir à la construction du mémorial, est simplement inconcevable. Jusqu’à récemment les médias allemands n’ont pas couvert ces événements et la presse internationale ne s’y intéresse toujours pas. Grâce aux réactions rapides de certains membres de la communauté, une campagne d’envoi de lettres et une manifestation réussie, tout changement au site du mémorial est abandonné pour l’instant. En attendant, cette absence de considération pour les Sinté et Rroms est scandaleuse. D’autres discussions sont nécessaires afin d’obtenir une confirmation définitive de la part des autorités fédérales de l’Allemagne et de la Deutsche Bahn, que le site du mémorial ne sera pas touché. Le message des Sinté et Rroms en Allemagne et à travers le monde est clair : le monument ne doit pas être touché et il ne le sera pas!
Il a fallu près de 40 ans pour que le gouvernement allemand reconnaisse officiellement la persécution sous le nazisme des communautés sinté et roms comme un génocide, ne cédant qu'après une grève de la faim très médiatisée au début des années 80 par plusieurs survivants des camps de concentration et le président du Conseil Central des Sinté et Roms, M. Romani Rose. Il a ensuite fallu 20 ans supplémentaires pour qu’il soit décidé de construire un mémorial et de trouver un emplacement approprié pour celui-ci. Le mémorial a été dévoilé et ouvert au public il y a moins de 10 ans, mais en quelques mois seulement, voilà qu’on décide presque unilatéralement qu'il serait déplacé. Juste comme ça, il semblait qu'ils pensaient qu'ils pouvaient agir sans effort pour enlever le monument, apparemment un détail insignifiant. Pour le construire, ils ont eu besoin de 60 ans de coups de coude de la part des communautés Sinté et Rroms pratiquement méconnues et presque entièrement oubliées. Ô là! Nous sommes toujours là!
Si M. Rose a bien été informé quelques mois auparavant, c’était apparemment à un moment où l’entreprise des chemins de fer avait déjà bien avancé dans ses négociations avec le gouvernement pour obtenir les autorisations nécessaires. Déjà bien sur lancés, les protagonistes du projet n’ont pas daigné contacter d’autres organisations sinté ou rroms. Sous le régime nazi, la compagnie de chemin de fer et le gouvernement étaient complices du transport de Rroms et de Sinté vers des camps de concentration à travers le IIIe Reich. La reconnaissance des victimes à travers les hommages et les quelques réparations se trouverait ébranlée dans son principe même, si on venait à toucher au mémorial.
Il est clair que la façon dont les autorités traitent ce monument est comme s'il ne s'agissait que de quelques objets inanimés dédiés au passé, mais nous sommes vivants et garderons en mémoire le souvenir de ceux qui ont péri à cause du nazisme. Nous devons leur rappeler cela en premier. Ensuite, nous attendons toujours le jour où l'on pourra dire que le monument n'est qu'une référence au passé. Mais en fait, notre devoir de mémoire nous rappelle aussi les injustices systémiques que nos peuples vivent et contre lesquelles ils résistent encore aujourd'hui. Il s'agit de confiance: sans une décision claire sur la conservation du monument, nous ne pouvons pas faire confiance aux autorités pour faire face à l'impact actuel de l'antitsiganisme sur la sécurité contre la violence, le logement, l'emploi, les soins de santé ou l'éducation. C'est pourquoi nous appelons les autorités allemandes à prendre une telle décision et à empêcher définitivement toute modification potentielle de ce mémorial de Berlin. Si cette période de la présidence allemande de l'UE se termine sans avoir de résolution définitive à ce sujet, le grand public européen devra se demander beaucoup plus ce que signifie «plus jamais» et avec cela, l'autorité morale de l'exceptionnalisme allemand deviendra un problème brûlant pour toute l'Europe.
Que pouvez-vous faire?
Pour l'instant, vous pouvez suivre le RomaSintiWire Online ou le Roma Antidiscrimination Network sur Facebook pour des nouvelles et des mises à jour sur la situation. (Pour votre information, vous pouvez trouver leurs communiqués de presse en allemand et en anglais suivant les liens ici dans le texte ou en bas dans les notes.) En outre, cette pétition-ci pour arrêter la construction existe toujours en allemand où vous pouvez signer ou faire un don, ainsi que vous inscrire pour des mises à jour automatiques. (C'est à vous d'utiliser Google translate pour le comprendre dans votre propre langue, pour l'instant). Faites entendre vos voix. Résistez. Votre signature, votre lettre, votre partage de ces informations ne sont pas vains. Liens: